mardi 22 mars 2011

Des Choses Fragiles

Quel conteur. Quel plaisir toujours renouvelé que d'ouvrir un ouvrage de Neil Gaiman. Des Choses Fragiles est un recueil de nouvelles. Beaucoup primées. Toutes différentes. Des idées simples et si lumineuses que l'on se demande systématiquement : quelle belle idée, pourquoi n'y ai-je jamais pensé ?

Une Etude en Vert, nouvelle mêlant les univers de Sherlock Holmes et de Lovecraft est tout simplement jouissive. La Présidence d'Octobre, où les mois de l'année se retrouvent autour du feu pour se raconter des histoires, est également un grand moment. La Vérité sur le Cas du Départ de Mademoiselle Finch, où le narrateur découvre un étrange cirque en représentation sous Londres, je l'ai relu à haute voix pour la savourer.

Il y a aussi des mini-nouvelles, comme d'Etranges Petites Filles : une douzaine de portraits de moins d'une page. Un exercice dans lequel l'auteur excelle.
Extrait de cette nouvelle : Pluie de sang (page 235, J'ai Lu)
"Voici : un exercice de choix. Votre choix. L'un des récits suivants est vrai.
Elle a survécu à la guerre. En 1959, elle s'est exilée en Amérique. Cette toute petite Française aux cheveux blancs, avec une fille et une petite-fille, habite désormais un appartement à Miami. Elle ne fréquente personne et ne sourit que rarement, comme si le poids des souvenirs l'empêchait de trouver la joie.
Ou bien c'est un mensonge. En fait, la Gestapo l'a ramassée alors qu'elle franchissait une frontière en 1943, et l'a laissée dans un champ. D'abord, elle a creusé sa propre tombe, puis on lui a tiré une balle dans la nuque.
Sa dernière pensée, avant ladite balle, a été qu'elle était enceinte de quatre mois et que si nous ne nous battons pas pour créer un futur, il n'en existera aucun pour personne.
Il est à Miami une vieille femme qui s'éveille, désorientée, d'un rêve où le vent soufflait sur les fleurs sauvages dans un pré.
Il est sous la terre chaude française des os inaltérés qui rêvent du mariage d'un enfant - une fille. On y boit du bon vin. Les seules larmes qu'on y verse sont des larmes de joie."


Avec Gaiman, le but est dans le chemin. Les conclusions m'ont rarement autant plu que le fil des histoires. Je souhaiterais plutôt qu'elles ne s'arrêtent pas. Un peu comme lorsque l'on finit le Seigneur des Anneaux et que l'on se voit obligé de vite le recommencer pour ne pas quitter Frodon et Sam.

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